J’aurais voulu être noire

J’aurais voulu, j’aurais voulu je crois, être noire.

J’aurais voulu, je crois qu’on lise sur ma peau. Que je n’ai pas a parlé, pas à me justifier. Sans cesse.

J’aurais voulu je crois, que l’on devine mes origines, sur mon visage et mon corps.

J’envie ceux qui, d’un regard, se reconnaissent et reconnaissent en l’autre l’appartenance à une même nation, un même héritage. Sans parler.

Et même chez moi, ce que j’appelle chez moi, même là-bas, peut-être encore plus qu’ailleurs, je dois justifier de ma blancheur, de mes cheveux blonds, de mes yeux bleus.

J’aurais voulu je crois, ne pas passer pour une étrangère chez moi, ne pas avoir à me justifier d’être ce que je suis.

Est-ce que l’on me voit du côté des bourreaux ? De ceux qui ont martyrisé la chair des noirs ?

Je ne suis pas ça.

J’aurais voulu, j’aurais voulu, je crois, que ma couleur extérieure reflète mon l’intérieur ;

parce que oui je danse comme une black, je ris comme une black, je chante comme une black, j’ai parfois les intonations d’une black… mais je ne suis pas … black.

J’aurais voulu je crois, que mon corps ne rappelle pas les pays froids, la Norvège, la Suède, l’Allemagne, la Hollande. Je suis le contraire de ce froid, je suis lave, je suis volcan !

J’aurais voulu je crois, avoir une marque d’appartenance corporelle autre que mon nez. Le nez des Lauret, comme on me l’a si souvent répété. Mais je ne suis pas que cela, je ne suis pas qu’un nez, je ne suis pas qu’une Lauret. Encore moins une Loré, Lauret écorchée.

J’aurais voulu je crois, avoir au moins, au moins, les cheveux bouclés.

J’aurais voulu je crois que mon corps soit le drapeau de mon île.

Elodie Lauret Écrit par :

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